Joueb.com
Envie de créer un weblog ?
Soutenez le Secours populaire
ViaBloga
Le nec plus ultra pour créer un site web.
Débarrassez vous de cette publicité : participez ! :O)
  Aquarium     Le Dictionnaire Bergien     Ecrire avec des Nageoires     Les Maximes Aquatiques     Poisson ça rime avec Saucisson     Les Post de Magnes  

le point de vue du poisson

Version  XML 
Vous faites des bulles!

Jeudi (04/11/04)
2186...qqlques jours plus tard...

VII : Mi-juillet 2186, quelques minutes plus tard

 

Depuis quelques minutes déjà, ils progressaient silencieusement dans la jungle. Ness tenait la tête du groupe, venaient ensuite Benjamin, Morgan et enfin Bill. Bien qu’ils se trouvaient encore à proximité du camp de l’Ilot éthylique, quelques fougères encombraient déjà le chemin. Morgan Cléopâtre fût la première à rompre le silence. « Tout à l’heure vous nous avez demandé si nous avions des questions à vous poser, j’aurais voulu savoir par quels miracles vôtre monde peut subsister depuis tant d’années. Ne serait-ce que pour la nourriture.

−C’est fort simple, répondit Ness, nous vivons principalement de chasse de pêche, plus un peu de cueillette, quelques petites cultures, une dizaine de bêtes d’élevage dans chaque camp. Pour ce qui est de la boisson, de l’eau claire.

−Mais vous ne buvez pas que de l’eau, intervint Benjamin.

−Les alcools sont le fruit des distillations que fait Le Hollandais dans son arrière-salle. Quant aux drogues douces, aux médicaments et à la poudre noire, chaque campement à son chimiste, leur savoir se transmet de père en fils.

−A-propos de fils, que faîtes vous de vos enfants, vous leur donnez des coups de gourdin pour les éduquer quand vous êtes saoul, à moins que vous préfériez les dépecer.

−Malheureusement, reprit Le Chien errant, les bourlingueurs sont obligés de se séparer de leurs enfants, ils sont élevés par les taverniers, ainsi ils ont un vrai chez eux où ils peuvent grandir et apprendre la vie. De plus nous cela nous permet de considérer chaque enfant comme nôtre propre enfant, et nous même comme des frères, on ne sait jamais. Mais vous, citadins que vous êtes, si j’en crois mes informateurs, vous agissez de même : vous payez à prix d’or des sociétés spécialisées et vous leur confiez vos gosses, puis vous les oubliez jusqu’à leur majorité, ce n’est qu’à ce moment là que vous les rappelez auprès de vous pour qu’il prennent vôtre suite dans les affaires.

−Pas du tout ! s’offusqua Benjamin.

−Non, continua Ness, cela ne vaut que pour les rejetons des familles aisées. Pas d’éducation pour les enfants des classes ouvrières. Eux, c’est l’usine qui les attend dès qu’ils sont en âge de fournir un travail.

−Mais… mais… bégaya le citadin.

−Et pour les femmes ? coupa Morgan.

−Nos femmes… répéta Ness avec un sourire en coin, vous les verrez rarement dans une taverne. La plupart du temps elles restent dans la jungle. Solitaires. Elles sont plus efficaces que nous pour ce qui est de trouver de l’eau, quant à se servir d’une arme, leur précision est impressionnante. Croyez-moi, les femmes sont certainement les animaux sauvages les plus dangereux de cette foutue jungle. Mais pour nous elles sont toujours des rencontres agréables. T’es d’accord avec moi Bill ?

−Cent pour-cent d’accord ! Déclara Le Lièvre en depuis sa position en queue de peloton.

−Qu’est-ce que vous voulez dire ? interrogea Benjamin.

−Ben, les enfants qui sont confiés aux taverniers, d’où croyez vous qu’ils viennent ? lança Le Chien errant.

−Alors vous avez des enfants ? questionna Morgan.

−Comment le saurions nous, dit Ness, c’est dans l’ordre du possible.

−Il vous est donc interdit de fonder une famille ! s’exclama la jeune femme.

−Pas du tout, le jour où on en aura assez des ballades on pourra se sédentariser à l’Ilot éthylique ou ailleurs. Alors il sera temps de fonder une famille et de cultiver deux ou trois arpents de terre. Mais rares sont ceux qui n’aiment pas bourlinguer et qui font d’assez vieux os pour s’installer à un endroit fixe. En tout cas pour le moment je préfère me marier plusieurs fois par mois et avec les arbres seuls pour témoins !

−Sur un plan plus matériel, reprit Benjamin.

−Alors c’est l’heure de l’interrogatoire ! s’exclama Le Chien, quoi sur un plan plus matériel ?

−Comment faîtes vous pour faire marcher une société sans recours à l’argent ?

−Eh bien c’est très simple, expliqua Le Chien errant, nous n’avons pas de portefeuille mais chacun d’entre nous est capable de chasser deux trois trucs et de les troquer par la suite. Mais la chose principale dans nôtre système de troc, c’est le respect qu’on vous porte.

−Le respect qu’on vous porte ! s’enquit Benjamin. Quel rapport avec le commerce ?

−Çà peut vous paraître étrange, mais dans nôtre culture, si vous êtes connu comme un escroc ou un sale type, alors personne n’accordera la moindre valeur à ce que vous possédez et quoi que vous demandiez on ne vous accordera rien. En revanche si vous avez sût gagner le respect de chacun par vôtre courage, vôtre sens de l’honneur, vôtre capacité à vous placer au dessus de toutes les situations par vôtre force de caractère. Et même de vôtre vie. Alors aucun service ne vous sera jamais refusé.

−Oui, intervînt Bill, d’ailleurs l’homme à la peau de lion qui vous ouvre le chemin mettrait en jeu sa vie sur une partie de poker comme vous jetteriez un simple jeton sur le tapis. Pour nous, risquer nos vies est la seule façon de vivre. C’est la seule chose qui nous fait monter l’adrénaline. Par exemple c’est pour çà qu’on vous accompagne, juste pour s’amuser. Et puis çà va nous faire des choses à raconter quand on reviendra à une taverne, et puis peut-être on prendra quelques peaux sur le trajet de retour.

−A-propos, dit Morgan, si vous troquez les fourrures avec les taverniers, eux, qu’en font-ils ?

−Eh bien, commença Ness, les taverniers les échanges avec des contrebandiers. Ainsi le produit de nôtre chasse alimente vôtre marché de la fourrure, du cuir. N’avez-vous jamais porté une fourrure ou utilisé des accessoires en croco. C’est de chez nous que çà provient. Il y à des campements spécialisés dans le crocodile tous le long de l’Amazone. En échange les taverniers obtiennent des vêtements, des armes et de l’alcool d’une qualité supérieure à ce que nous bricolons ici. Plus des médicaments et des drogues dures. Sans oubliez des nourritures raffinées, des objets manufacturés et des livres.

−Des livres ! s’étonna Benjamin, et qu’en feraient-ils ?

−N’oubliez pas que nos barmen sont chargés de l’éducation de nos enfants. Ils doivent leur faire connaître des choses nouvelles. Plus tard ils doivent être en mesure de choisir entre rester chez nous, où aller épaissir les rangs de vos usines protoniques. Je ne vous cache pas que jamais aucun, à ma connaissance, n’a préféré cette deuxième solution. Alors ils doivent aussi avoir à leur disposition des armes, des munitions et tout un attirail neuf pour le jour de leur départ en tant que chasseur. Les taverniers sont les personnes que nous respectons le plus, ils sont nos pères et les pères de nos enfants. C’est pour cette raison que ne peuvent devenir patron de taverne que les gens respectés par l’ensemble de la communauté. Vous pigez ?

−Je voudrais aussi savoir, demanda Benjamin, est-ce que vous êtes déjà entré dans une ville ?

−Assez de questions, dit Ness d’un ton tranchant, maintenant tait-toi et fait gaffe où tu met les pieds, citadin ! Le Lièvre, tu prends la tête ?

−Ok, vieux clébard galeux ! Remise ta machette ! »

         Bill prit alors la tête du petit groupe et le quatuor continua sa progression. La végétation qui se faisait pas après pas plus touffue resserrait ses griffes autour d’eux. Voyant l’état de fatigue de leurs invités, Bill annonça qu’ils feraient une première pause quelques kilomètres plus loin.

 

Ecrit par Magnes, à 12:23 dans la rubrique " Ecrire avec des Nageoires ".
Lire l'article ! (suite de l'article + 0 commentaires)


Vendredi (08/10/04)
bon ben c'est la suite...

--> ...mais çà s'améliore pas...

V : Mi-juillet 2186, le même soir, une heure plus tard

 

Finalement, après plus d’une heure de jeu acharné, Ness remporta le perroquet, il prenait la cage quand un vaincu trop soiffard se leva, prit une bouteille par le goulot et la cassa sur le bord de la table. Ness sortit un couteau d’une de ses poches arrière et le lança. La lame se planta dans le bois de la table, juste devant son vis-à-vis : « si tu veut vraiment te battre contre moi tu aura besoin d’une arme véritable » lança le Chien errant. Les deux combattants se regardèrent dans les yeux, puis éclatèrent simultanément de rire. « Çà alors L’Embrouille, dit Ness, tu m’as encore eut. À toujours faire des blagues pareilles tu finiras par te faire buter, souvient toi de ce que je vient de te dire. » Quelques secondes plus tard les deux hommes trinquaient ensemble. Après avoir porté un toast à l’avenir Ness défit le fil de fer qui maintenait l’osier, la cage s’ouvrit et laissa échapper l’oiseau. Une si longue partie pour le plaisir de libérer un perroquet ! Le volatile voleta de parts et d’autres la salle avant de passer enfin sous la poutre qui marquait l’entrée de la taverne.

Ce fût sous ce même passage que, quelques secondes plus tard, une panthère se faufilait, un habitué la regarda avec désintéressement. Le fauve observa l’intérieur capharnaümesque avec un petit grondement, puis le félin bondit sur la table la plus proche et rugit. Un homme dont-elle avait renversé le verre se saisit de son arme et abattit l’animal. Beaucoup de personnes parmi l’assistance ne cherchèrent même pas à savoir quelle était la cause de cette agitation. Celui qui s’était rendu maître du bestiau désirait maintenant en récupérer la fourrure. Il dépeça l’animal à même le sol.

Morgan Cléopâtre avait été marquée par cet incident et se sentait de moins en moins en sécurité, elle n’était vraiment pas à son aise coincée entre les baroudeurs et les fauves. Elle guettait encore l’entrée quand un individu poussa la porte à double battant. L’homme était roux et paraissait moins de vingt-cinq ans, son visage encore emplit de tâche de rousseurs était encadré d’une barbe de deux semaines. La seule chose qui recouvrait son torse d’athlète était la bandoulière d’un fusil de chasse rafistolé à l’extrême. Il se dirigea vers le comptoir, déposa les quelques fourrures qu’il traînait derrière lui sur le zinc et s’adressa à Jack : « Bonsoir maître des empoisonneurs, voila pour toi, donne moi ce que tu a de meilleur à fumer !

−Tient Bill, prends celle-là, on ne m’en a dit que du bien. » Pendant la duré de cet échange Ness s’était faufilé derrière l’homme et lui administra une bourrade amicale.

         « Alors Le Lièvre, t’es venu chercher une carotte, dit le chien errant en désignant le petit rouleau incandescent qui pendait des lèvres de l’autre.

−Ness, vieux clébard, s’exclama celui-ci, qu’est-ce que tu fais là, tu bourlingues plus avec Léria, cette Furie ?

−Non, elle devenait incontrôlable. Pire que d’habitude ! Mais écoute moi j’ai une ballade à te proposer. » Ness raconta à son acolyte l’histoire des rescapés de l’extra-atmoshérique et lui expliqua qu’il avait accepté d’escorter ces naufragés des temps hypermodernes jusqu’à New-Janeiro. Bill Le Lièvre qui fume la pipe accepta de lui prêter main-forte dans cette mission. Le Hollandais, qui les écoutait, versa trois verres et ils trinquèrent tout trois à cette nouvelle escapade risquée. Puis les deux compères rejoignirent Morgan Cléopâtre et Benjamin à la table qu’on leur avait accordée. Bill se présenta et déclara qu’il se joignait à eux pour l’aventure. Puis il remarqua que le chemin serait long et périlleux, ils partiraient tôt le lendemain et avaient tous besoin de dormir. La taverne du Hollandais était complète, ou du moins c’est ce qu’il prétendait. On répartit les citadins chacun chez un baroudeur en tirant à pile où face. Morgan Cléopâtre irait dormir chez Bill Le Lièvre tandis que Benjamin passerait la nuit chez Ness Le Chien. Les couples ainsi formés se séparèrent en se donnant rendez-vous tôt le lendemain devant la taverne.

         Morgan était contente que le sort ait choisit de la liée à Bill Le Lièvre, lequel paraissait plus courtois que Le Chien errant. Elle le suivit au travers des chemins qui serpentaient entre les masures qui composées ce camp. Elle n’avait pas pensé que cet « Ilot éthylique » eut compté tant d’habitations. Ils en contournèrent une bonne vingtaine avent de longer une bâtisse esseulée au sein du groupement, de plus l’endroit était entouré d’une forte odeur de soufre. Bill expliqua qu’il s’agissait de la demeure de l’alchimiste local. Il fabriquait de la poudre pour les armes, des onguents médicinaux, des drogues douces et Dieu sait quoi encore. Le Lièvre logeait tout près de là, une cabane d’apparence simple, tellement simple en réalité qu’elle n’était pas meublée, juste un lit qui occupait tout un coin se l’unique pièce. Le matelas était fait de deux grands morceaux de tissus cousus ensembles et le tout fourré de plûmes.

« Je vous laisse le lit, avait déclaré Bill.

−Et pour les toilettes ? demanda Morgan

−Prenez un bout de chiffon et enfoncez vous un petit peu dans la forêt, répondit le Lièvre avant de s’installer à même le sol. Son fusil prêt à faire feu était posé à quelques centimètres de sa main droite.

 

 

VI : Mi-juillet 2186, le lendemain

 

         Cela faisait longtemps que Morgan n’avait pas aussi bien dormit, même si Bill la réveilla fort tôt. Ils furent devant la taverne avant même le levé du soleil, ils durent attendre un bon quart d’heure avant de voir arriver Benjamin accompagné de Ness. Le Chien errant avait maintenant un œil au beurre noir et une arcade sur ciliaire ouverte. « Celui-là il se repose jamais ! Pour lui quoi qu’il en soit c’est tous les soirs la fiesta, et plus c’est le bordel mieux c’est !» commenta Bill. Les quatre personnes entrèrent enfin dans la taverne pour prendre un premier repas ainsi que des provisions pour les premiers jours de voyages. Les baroudeurs et les citadins s’installèrent à deux tables différentes. L’établissement était quasi désert et de nombreuses tables étaient renversées, une bagarre générale avait certainement eut lieu après leur départ, Morgan Cléopâtre aurait parié que Le Chien errant y avait été mêlé. « Qu’est-ce qui est arrivé à Ness ? demanda-t-elle à Benjamin dès qu’il furent installés à leur table.

−Quand on est arrivé dans ce qui lui sert de logement, il m’a installé une couche et puis il est ressortit en disant qu’il avait une revanche au poker à disputer. » Mais Morgan ne prêtait plus attention à ce que lui disait Benjamin, elle écoutait ce que disaient Ness et Bill au Hollandais en passant leur commande, à quelques mètres de là.

         « Alors Ness, disait Jack, tu t’es remis de la bagarre de cette nuit ?

−Ouai sans problème par contre je vois que tu n’as pas fini de remettre la salle en ordre.

−C’est vrai, je suis entrain mais j’au aussi dût m’occupé de Rembrandt, il est encore dans les vapes le pauvre.

−Quand il se réveillera tu lui dira de ma part de ne plus parler de Léria La Furie devant moi !

−Mais nous croyions tous qu’entre vous c’était une histoire finie, s’étonna le Hollandais.

−En effet mais raconter leur ressente étreinte devant moi était un tel manque de tact, déclara Le Chien errant, enfin bref, tu nous serviras à tous un petit déj’, seulement pour les deux bourgeois là-bas, tu remplacera l’alcool de grain par du petit lait, tu as toujours tes chèvres au moins ?

−Oui, répondit Le Hollandais, il m’en reste six.

−Parfait, reprit Ness, et puis tu nous prépareras des sacs de provisions pour cinq jours, merci Jack ».

         Le Hollandais suivit les instructions du Chien errant à la lettre, ils furent servis avec beaucoup de tact, puis il remis ses tables en ordre.

Quand ils eurent tous achevé leur repas et pris leur sacs, Bill réunit tout le monde pour un briefing d’avant départ. Le soleil s’élevé peu à peu dans le ciel, des consommateurs venaient prendre leur premiers verres tandis que d’autres s’éveillaient sous des tables.

« Bon, je vous résumes la situation, commença Bill Le Lièvre qui fume la pipe, nôtre destination est donc New-Janeiro, ce qui nous fait plus de 350 kilomètres à parcourir, comptons 12 heures de marche chaque jour à une allure de quatre bornes à l’heures dans la végétation. Donc 50 kilomètres par jours, çà nous donne sept jours de voyage en gros. Nous sommes donc partit pour passer une semaine dans la jungle. Ness et moi sommes armés en conséquence. Nous avons de quoi boire pendent toute la randonnée et suffisamment de nourriture pour quatre jours. Ness et moi nous porterons les citernes tandis que vous vous chargerez des sacs de vivres. Maintenant une ou deux recommandations de sécurité : une fois dans la jungle nous marcherons en file indienne, moi et Ness nous alternerons, l’un en première position avec une machette et l’autre en dernière, chacun son tour. Si vous avez le moindre problème ou le moindre doute c’est à nous que vous en parlez. Pour le moment il n’y à aucune consigne de silence mais tachez de ne pas parler excessivement fort ! Maintenant le plus important, Ness et moi avons une grande expérience de ce milieu hostile, alors si on vous dit de faire quelque chose, faites le sans discuter. Je crois que c’est à peu près tout, bon si vous n’avez aucune question nous partons. » Termina Le Lièvre avant de leur faire signe de le suivre, ils sortirent de la taverne. Sauf Ness qui les rejoignit quelques instant plus tard. « J’ai salué Le Hollandais de vôtre part à tous, il m’a donné ceci pour le voyage » déclara-t-il en sortant un couple de bouteilles de dessous sa peau de lion.

Ecrit par Magnes, à 23:55 dans la rubrique " Ecrire avec des Nageoires ".
Lire l'article ! (suite de l'article + 0 commentaires)


Dimanche (03/10/04)
j'ai trop bu ce soir...

--> çà donne çà...

Διογένης  καί  Κλεοπάτρα

 

(Diogène et Cléopâtre)

 

 

 

Prologue : fin juillet 2186

Ce regroupement de cabanes était un des oasis humains que l’on trouvait encore dans la jungle. Cette taverne en était le centre. Elle tenait lieu d’église, de casino et d’abreuvoir.

Il poussa la porte et entra. Il revenait visiblement d’un long voyage. C’est bien ce à quoi l’on pouvait s’attendre de la part d’un homme que l’on nommait « Ness Le Chien errant ». Les habitués délaissèrent leurs cartes et le saluèrent en levant leur verre à sa santé, il leur rendit leur salut d’un sourire un peu forcé puis se dirigea vers le comptoir. Jack, le patron, s’approcha de lui et devina à son visage fourbu et à son torse éraflé par les ronces, une soif d’alcool fort, très fort, un de ces désinfectants que les bons taverniers conservent toujours dans leur caves en mettant un rat dans chaque tonneaux, pour corser le bouquet.

« Voila pour toi, Le Chien, de l’alcool de Palomito, j’ai pas plus fort dans ma réserve. J’espère qu’après çà tu nous raconteras cette dernière ballade…Et Le Lièvre qui fume la pipe,  il est plus avec toi ?

−Le Lièvre n’en reviendra pas, Jack » répondit l’assoiffé avant de vider son verre d’une gorgée et d’en demander un autre. Il avait toujours eut tendance à boire plus que raison, surtout dans ces circonstances. Le Lièvre qui fume la pipe était son meilleur ami, un compagnon de route hors pair, on l’appelait ainsi car il parlait toujours posément et pesait chacune de ses décisions avec attention. Mais maintenant Le Lièvre reposé dans la jungle. De toute façon ceux qui ne meurent pas à la taverne meurent en dehors et dehors c’est la jungle.

 

 

I : Début juillet 2186

 

Du haut de sa tour particulière, Morgan Cléopâtre regardait l’immense ville qui s’étalait à ses pieds. Face au grondement de la citée, à ses vapeurs et à ses mouvements brusques, la hauteur de ce belvédère privé et son calme donnait l’impression d’observer le monde des hommes depuis une autre planète. Une véritable tour d’ivoire. Ici, elle pouvait réfléchir en toute sérénité, penser à son avenir.

Elle était fraîchement diplômée de l’EcoEco (école économique). Demain, le cinq juillet, elle prendrait le jet extra-atmosphérique de son père en compagnie de Benjamin. Une fois à New-Paris, son père, le secrétaire à l’économie mondiale et roi d’Europe, leur donnerait sa bénédiction. Le mariage serait retransmis sur toutes les ondes pour faire rêver les ouvriers des usines à énergie protonique. Elle n’éprouvait aucun sentiment particulier pour Benjamin, mais ils avaient été promis l’un à l’autre dès leur enfance et jamais elle n’avait remis en cause cette union. Pour elle, l’amour n’était qu’un idéal permettant de maintenir tranquille les masses laborieuses.

En attendant New-York lui semblait bien ennuyeuse, si la ville était encore dans les ensembles comptants le plus d’étudiants, mais les zones agréables à l’œil se faisaient de plus en plus rare. La main d’œuvre sous-payée salissait les espaces urbains pour y élever des barres d’immeubles sur des fondations d’immondices. Ces grosses boites de rangement se hérissaient par la suite d’antennes et de paraboles qui procuraient des illusions de masse à une masse qui n’avait plus d’illusions à se faire. Les téléviseurs 3d assaillaient ces pauvres sacs de neurones affalés sur leur canapé. Le sentiment de lassitude qui étouffait la ville avait poussé les familles aisées à déserter New-York. Les universités suivraient bientôt en entraînant leurs étudiants. Alors la ville ne serait plus qu’une masse informe d’usines. Un tas de travailleurs fatigués ne croyant plus qu’à la pause déjeuné et à la sonnerie de fin de journée mais haïssant par-dessus tout la sonnerie de leur radio-réveil.

         Morgan Cléopâtre ne comprenait pas le train de vie des ouvriers, si dans son milieu la famille était l’association de personne la plus importante, la plus lucrative, eux ne semblaient voir que des collègues, colocataires, ou autres copains. Si l’argent et le pouvoir de son père lui conférait une liberté quasi-totale, les pauvres étaient surveillés, espionnés et contrôlés jusque dans les goûts pseudo-artistiques que leur imposaient les producteurs télé. Si elle, elle pouvait aller à loisir de New-York à New-Paris par extra-atmosphérique, eux, ils devaient subir tous les matins les bousculades dans le métro ou les embouteillages des grandes villes, et de même chaque soir pour revenir de leur boulot si mal payé.

         La princesse laissait ses pensées errer dans le vague comme son regard divaguait dans l’air. Puis ses yeux se posèrent sur un automobiliste réfractaire aux parkings payants, et qu’un représentant de l’ordre calmait à coup de matraque. La vue de cet homme assommé lui fit prendre consciences qu’elle était elle-même assommée de fatigue. Le lendemain elle irait à New-Paris, puis marcherait jusqu’à l’autel. Avant de s’ouvrir sur une journée pareille, ses grands yeux noirs avaient besoin de sommeil.

         Arrivée à son lit elle laissa glisser son peignoir et défit son chignon. Ses cheveux sombres libérés coulaient sur ses épaules. Ses yeux et ses cheveux noirs contrastaient avec la blancheur de sa peau. Une peau si douce que les draps gémirent lorsqu’elle s’allongea sur le lit. Elle fit encore vibrer l’oreiller en le caressant de sa joue. Puis elle s’assoupit, et toute la nuit, le coussin fortuné vibra sous son souffle régulier.

 

 

II : début juillet 2186, le lendemain

 

         Dès que l’appareil eut quitté l’atmosphère terrestre et commencé son vol libéré de toute pression, Morgan délaissa Benjamin, qui suivait l’évolution des cours boursiers sur la chaîne spécialisée, et alla s’installer dans le cockpit. Elle avait toujours préféré la vue panoramique qu’offrait la position à la tête de l’appareil, plutôt que les piètres coups d’œil que permettaient les petites lucarnes qui servait de hublots aux engins extra-atmosphériques. Assise à côté du pilote, elle parvenait à reconnaître les grandes cités qui s’étendaient à la surface de la Terre. Et, autour des îlots gris qui étaient des Mégalopoles, tout ces espaces en friches. Quelle jungle çà devait être !

         « Que de logements et d’usines il nous faudra bâtir avant d’annihiler cette forêt exubérante, dit-elle au pilote.

−De toute façon, répondit celui-ci, maintenant que nous savons recréer du dioxygène sans recourir à la photosynthèse des végétaux, cette verdure ne nous sert plus à rien et personne ne s’opposera à sa conversion en espace rentable. Sauf peut-être les baroudeurs, si on détruit leur milieu de vie ils vont vite devenir une espèce menacée.

−Les baroudeurs, qui sont-ils ? interrogea la princesse.

−Les rescapés de l’urbanisation, ils ont refusés de quitter leur terre quand on a décrété l’obligation de venir vivre en ville. Expliqua le pilote. Maintenant leurs terres ont étés envahis par la friche, alors certains ont put se regroupés dans des espèces de campements où ils parviennent à cultiver de quoi survivre, le reste du temps ils boivent le produit de tous ce qui peut être distiller dans des bistrots insalubres.

−Et ceux qui n’ont pas put se joindre à ceux-là ? demanda la princesse. Sont-il… ?

−Non, ils ne sont pas mort de faim, continua l’homme de barre, mais ils sont revenus à l’état sauvage, des hordes indigènes vivant de chasse et de racines.

−Dire qu’on nous enseigne qu’il s’agit d’espace vide d’homme… Des baroudeurs, des tribus à l’état de nature… énonça la diplômée de l’EcoEco

−Dites plutôt des alcooliques et des meutes d’animaux. Et puis, si on considère cette forêt comme inhabitée c’est qu’on ne veut pas avoir de remord quand on la détruit. Et puis quoi ! L’obligation de vivre en milieu urbain n’a-t-elle pas été décrétée dans le but d’alimenter les usines protoniques en main d’œuvre ! »

         Morgan réalisa alors la précarité de tout ce qu’on lui avait jusqu’alors appris, mais dans quelle mesure pouvait-elle prendre les dires de ce chauffeur pour argent comptant. De toute façon cela lui importait peu que des personnes vivent dans cette jungle qui embrassait la Terre d’un vert profond. Un vert d’espoir dont les yeux de la princesse ne parvenait plus à se détacher.

         Soudain le tableau de bord s’illumina de dizaines de boutons luminescents. Dans le même temps l’ordinateur de bord entonnait une mélodie en morse, sur l’écran clignotaient par dessus un fond jaune quelques mots que la princesse n’osa pas prononcer, ce que le pilote fit sur un ton plutôt calme.

         « CARBURANT : NIVEAU CRITIQUE. C’est un incident technique, mademoiselle. Procédure d’urgence. Nous allons devoir redescendre et nous poser là où ce sera possible. Mettez-vous en sécurité. Rejoignez vôtre futur dans la partie passager et bouclez bien vos ceintures. Acheva-il en reprenant les commandes en manuel. Puis, devant la mine déboussolée de sa passagère, il ajouta d’un trait : Allez-y faites ce que je vous dit c’est pas le train fantôme ici ! » Ce qui eut le mérite de la faire réagir et quitter le poste de pilotage.

         Elle ne reprit vraiment ses esprits que quelques minutes plus tard. Benjamin se trouvait à ses côtés. Ils étaient étroitement attachés à leur siège d’atterrissage. La ceinture trop serrée lui compressait fortement le ventre. A sa droite, Benjamin tremblait de tous ses membres depuis que les alarmes et les voyants de détresse étaient entrés en fonctionnement. Cléopâtre guettait les événements par son hublot. Comme le pilote l’avait dit, il faisait descendre son appareil. L’engin achevait sa rentrée dans l’atmosphère dans des tremblements inquiétants. Ils continuaient de perdre de l’altitude. Le sol se rapprochait à une vitesse angoissante, jamais elle n’avait vue des arbres d’aussi près. La voix du pilote se fit entendre dans la sono, le ton était maintenant plus que sinistre.

         « Bien que nous survolions la jungle nous sommes obligés d’atterrir, sinon les réservoirs seront bientôt à sec et le jet tombera comme une pastèque. Cramponné vous et bonne chance à vous deux ! Lâcha-t-il encore avant d’ajouter pour lui-même mais sans avoir couper la transmission : et maintenant on va bien voir si je suis foutu de poser cette putain de carlingue en catastrophe ! »

         L’aéronaute reprit sa descente de plus belle. Morgan Cléopâtre eut encore le temps de voir la cime des arbres se rapprocher jusqu’à frôler l’aéronef, puis…

 

 

III : Début juillet 2186, le lendemain et les jours suivants

 

         Cléopâtre fut éveillée par un baisé sur les lèvres. Elle ouvrit les yeux. Il s’agissait d’un ouistiti. Le mouvement de surprise qui suivit ce premier contact avec la forêt sauvage fit peur au petit animal qui s’enfuit sous un fauteuil de l’appareil. La jeune femme détacha la ceinture qui lui comprimait encore l’abdomen, respira à fond, puis perçut le souffle régulier de Benjamin à sa droite, elle le réveilla d’une secousse à l’épaule.

         « Ou sommes nous ? questionna-t-il en un sursaut.

−Nous sommes dans l’épave de l’extra-athmosphérique.

−Et çà, c’est normal ? s’enquit-il en désigna le ouistiti. Le petit singe s’était maintenant installé sur le fauteuil et faisait des grimaces dans leur direction. Il ressemblait à un patron arborant un sourire méprisant à des employés renvoyés.

−Nous sommes dans la jungle » déclara Morgan comme si elle essayait de s’en convaincre elle même. Selon toute probabilité l’extra-atmosphérique s’était crashé dans la forêt luxuriante, de plus la présence d’un primate ne laissait aucun doute permit. La tôle de l’appareil s’était cabossée et déchirée. De nombreuses ouvertures laissaient voir les arbres exubérants autour de ce qui n’était plus qu’une épave perdu au milieu de nulle part. Par chance, Morgan était intacte et son compagnon souffrait seulement de quelques contusions. Il fallait maintenant aller voir le cockpit, le pilote, la balise de détresse. Mais il ne restait rien de la tête de l’avion, le cockpit était venu finir sa course sur un arbre au tronc énorme. La cabine de pilotage tenait désormais sur 50 centimètres d’épaisseur. Nul homme n’aurait put survivre à un pareil choc, quant à une éventuelle balise de détresse, il ne fallait pas y compter.

         « Mais tu es une fille importante, avait dit Benjamin, on va te chercher, déployer des moyens logistique pour nous retrouver et nous ramener chez nous ! » Elle avait dût lui faire admettre qu’aucun satellite, aucun laser, aucune technique ne pourrait détecter leur présence sous les arbres. Lui faire comprendre que le seul moyen pour eux de se faire remarquer était d’allumer un feu, mais ils ne pouvaient pas prendre le risque d’allumer un feu qu’ils seraient incapable de contrôler. Bref, lui faire comprendre qu’ils ne pouvaient compter que sur eux même. Une fois que Benjamin eut admis l’évidence, elle lui répéta ce que le pilote lui avait expliqué, qu’il y avait des campements humains un peu partout dans la jungle, que leur seule chance de salut était de rejoindre l’un d’entre eux.

         Ils prirent le maximum de vivres qu’ils le pouvaient puis se mirent en route. Leur progression était lente et approximative. Ils étaient habitués aux grandes artères, aux plans en échiquier des grandes villes, et les voila coincés entres des arbres immenses et des fougères touffues. Ils dormaient peu, perchés dans des petits arbres. Benjamin était déjà entré plusieurs fois en crise de panique en entendant des mouvements dans les arbres environnants, par chance, ils n’avait pour l’instant rencontré que des animaux ne présentant aucun danger pour l’homme ou ayant déjà rassasié leur faim auparavant.

         Morgan aurait aimé que Benjamin prenne des décisions, des responsabilités, mais pour l’instant ils se contentaient de marcher à pas feutrés, et c’est elle qui prenait les rares initiatives qui rythmaient leurs déplacements.

Deux jours plus tard ils avaient presque terminé leur réserve de vivres.

Ce soir là, un sac de victuailles mal refermé avait attiré près d’eux un bon nombre d’animaux. Ce fût un tigre qui se présenta devant eux le premier, il paraissait affamé et les regardait bien en face. Sous l’effet de la peur, Benjamin avait les genoux qui tremblaient, tandis que Morgan était pétrifiée et ne parvenait plus à respirer. Tout à coup le garçon poussa un hurlement. Ce crie amena le félin à entrer en action, il se précipita vers eux. En quelques foulées l’animal était parvenu à trois mètres de ses proies. Il se préparait à bondir quand une détonation secoua l’air. Le fauve s’écroula.

         L’homme qui sortit des fourrés le fusil à l’épaule après la chute du tigre se présenta sous le nom de Doug Le Caféier. L’individu était vêtu d’un épais vêtement de laine et transportait avec lui un stock de peau de bêtes. Il tenait certainement son surnom de sa haute stature et de sa capacité à rester planté debout dans la jungle, l’arme prête à faire feu, et ce durant des heures. Dès qu’il eut récupéré la peau du tigre et éloigné les fauves attirés par le sang de la charogne, il se retourna vers Morgan et Benjamin et leur dit qu’il les amènerait au campement le plus proche. Là, une fois dans la taverne, il pourrait chercher une personne susceptible de les escorter jusqu’à la ville la plus proche.

 

 

IV : Mi-juillet 2186

 

         Quelques jours plus tard, alors que la nuit tombait, ils arrivèrent au campement appelé l’Ilot Ethylique. La construction principale en était la taverne du « Fût Percé ». Le bâtiment était imposant par rapport aux cabanes insalubres qui l’entouraient. L’architecture de ce centre de village était aussi fort surprenante, des poutres épaisses soutenaient les longs troncs recourbés qui faisaient office de toit. L’ensemble rappelait vaguement un bateau à fond plat retourné. Ils suivirent Doug et passèrent les portes de style saloon qui marquaient l’entrée.

Avant de s’installer à une table du fond pour négocier les fourrures qu’il avait ramené, Le Caféier leur conseilla de s’approcher du bar afin de quérir les renseignements qui leur seraient utiles. Le comptoir était comme un récif sur lequel de nombreuses épaves s’étaient échouées, puis étaient ensuite restées amarré à un verre d’alcool. Sur l’océan de tables flottaient des nappes de joueurs, de commerçants, des rires, des pleurs et des pointes de bagarres. Le tout étant découpé par des vagues régulières d’alcools forts, lesquelles dégageaient des relents acariâtres qui offensaient les gorges des visiteurs. L’écume d’une fumée âcre et qui piquait les yeux laissait tout un coin de l’immense salle dans la brume. Morgan se demandait ce que l’on pouvait bien fumer dans un endroit pareil pour produire un tel brouillard, et dire que les autorités avaient depuis longtemps prohibé la consommation d’alcool ! La jungle ressemblait à une anarchie des plus complète au regard des villes, elle se demandait comment une société ne reconnaissant aucune autorité pouvait subsister depuis tant d’années, surtout en tenant tête à une nature aussi peu accommodante.

Lorsqu’il arrivèrent auprès du bar, Benjamin interpella le barman : « Garçon, Garçon s’il vous plaît ! L’homme qui s’approcha d’eux était chauve. Son ton autoritaire était en partie dût à un surplus de boisson.

−Je suis Jack Le Hollandais, le patron de cet établissement. N’oublie jamais çà petit ! Qu’est-ce que je vous sers ?

−Eh bien, reprit Benjamin quelque peu désarçonné, donnez nous quelque chose de simple, du jus de fruit par exemple.

−Du jus de fruit ! J’ai pas çà en stock, mais buvez donc ceci. » Acheva le tavernier en déposant un verre devant chacun d’eux. Le liquide était pâle et tiède. Ils le portèrent à leur bouche. Morgan eut du mal à retrouver son souffle après avoir ingurgité un tel breuvage. Quant à Benjamin, il recracha le tout sur le zinc : « Rrra, c’est fort !

−Fort ? Répéta Jack, c’est la boisson des marmots, la traite de ce matin avec du distilla de grain, lait de chèvre et vodka en gros, si vous trouvez çà fort allez vous tirez de l’eau au puis ! A droite en sortant !

−A vrai dire nous ne somme pas vraiment ici pour boire, contra Morgan Cléopâtre, nous sommes citadins et…

−Çà merci, j’avais remarqué ! Coupa Jack, et vous cherchez un guide pour vous mener jusqu’à New-Janeiro, c’est bien çà ?

−C’est bien çà, approuva Morgan, alors nous sommes proches de New-Janeiro ?

−Simplement quelques centaines de kilomètres, poursuivit le Hollandais, mais la jungle est très dangereuse, si vous cherchez un accompagnateur chevronné adressez-vous à Ness Le Chien errant, vous voyez c’est le gars qui joue aux cartes à la table là bas, avec la peau de lion sur les épaules. Portez lui çà, ajouta t-il en leur présentant une bouteille intitulée canne à sucre, ainsi il vous accueillera tout sourire.

−Nous vous remercions, déclara Benjamin, combien nous devons vous ?

−Comme je ne vous ai pas servit grand-chose et que de toute façon vous n’avez rien à troquer, je me contenterais de vôtre respect, petit. Bonne chance » conclut Jack le Hollandais.

         Morgan et Benjamin s’approchèrent de la table où se trouvait Ness. Celui qu’on appelait Le Chien errant était en fait un jeune homme aux yeux clairs. Ses vêtements affinés par l’usage étaient recouverts d’une peau de lion. La tête de celui-ci lui servait de couvre-chef si bien que ses cheveux bruns se confondaient avec la crinière du fauve. Un fusil était posé en appuis contre sa chaise et, quelque peu dissimulé sous la fourrure, on devinait qu’il portait une cartouchière de cuir. Il tenait ses cartes avec distraction mais observait attentivement chacun de ses adversaires. Il était évident qu’ils jouaient au poker. Une cage d’osier contenant un perroquet multicolore semblait être l’enjeu de la partie.

         « Monsieur Ness ? interrogea Benjamin.

−Ness tout court, rectifia l’homme, qu’est-ce que vous voulez ?

−Juste vous parler, répondit l’importun. Mais son interlocuteur ne daigna pas détourner les yeux de son vis-à-vis.

−J’espère que c’est important, dans tous les cas vous attendrez la fin de cette partie !

−Nous avons ceci pour vous, intervint Morgan en déposant la bouteille que leur avait donnée Jack devant l’homme à la crinière, c’est de la part du patron.

−Le Hollandais aurait-il renouvelé son stock de serveuses ? demanda le joueur de cartes après avoir daigné regarder son interlocutrice, merci pour le rhum, continua t-il après quelques gorgées, je vous verrez juste après cette mène, sans faute. »

         Ness termina la mène en question sur un échec, puis il s’excusa quelques instants auprès de ses compagnons de jeux, le temps d’avoir une petite conversation avec les nouveaux venus. Il s’attaqua alors avec plus d’entrain à la bouteille d’alcool de canne à sucre pendant que les rescapés de l’extra-athmoshérique lui expliquaient ce qu’ils attendaient de lui. Il écouta la proposition avec indifférence mais l’accepta cependant : « c’est d’accord pour la petite promenade, mais pas de récompense, disons plutôt que vous m’offrirez quelque chose de chouette quand on sera arrivé, de nouvelles grolles par exemple. Bon, on va attendre un ami qui nous accompagnera, il ne devrait pas tarder à rappliquer. Moi je vais finir ma partie, quant à vous asseyez vous quelque part et buvez un coup. » Pour sa part il avait fini la bouteille qu’on lui avait placé entre les mains.

         Ness retourna à sa table de jeu tandis que les deux citadins s’installaient dans son voisinage. Morgan se demandait si un chien errant était un guide idéal, mais de toute façon ce lieu lui était si peu familier, aucune lois et aucune bienséance, une assemblée de trappeurs alcooliques passant leur temps à jouer des perroquets au poker. Cette partie du monde semblait ignorée de toute harmonie, c’était un désordre incohérent où le troc de peau de bêtes s’emmêlait avec la fumée de cigarettes très particulières. Un adolescent circulait entre les tables et proposait des pilules en échange de fourrures de qualité. Ces pastilles ne faisaient certes pas partie de traitements thérapeutiques. Quelque peu dissimulés par le comptoir, deux enfants faisaient la plonge en vidant les fonds de verres.

         [ A droite de l’entrée, un groupe d’une vingtaine de personnes rapprochèrent plusieurs tables et commandèrent une tournée. Après leur sixième tournée, l’un d’entre eux grimpa sur la table tandis que ses camarades frappaient dans leurs mains. Le polichinelle entama alors une danse grotesque avant de commencer à chanter.

 

 

Ø (La petite entracte de l’auteur) : 2186, le tube de l’année

 

Dans les bras de la fée verte

Interprété par : The histrion’s band

 

Je rêvais d'une femme

Qui ne serait qu'amour.

Je rêvais d'une flamme

Qui durerai toujours.

 

A sa recherche j'ai fouillé la Terre,

Arpenté les chemins, parcouru les ondes.

A sa recherche j'ai renversé le monde,

Et je la retrouve ici, dans ce verre.

 

Absinthe! Absinthe!

Et s'envole ma vie désespérée.

C'est une bien piètre perte

Puisque je recommence à rêver,

Dans les bras de la Fée verte

 

Tu m’as tenu par la main jusque dans le ciel.

Je ne me souviens plus ce qui est réel. Irréel?

De ce corps si malsain, la volupté me débarrasse.

Nos regards embrassent le monde, et tendrement, je t'embrasse.

 

Je rêvais de cette femme

Et de son monde enchanté

Construit par mes fantasmes.

J'aurai voulu tout garder.

 

Effets de l'Absinthe!

Que n'êtes vous éternels?

Mon bonheur touche à sa fin!

Forcé de quitter ma belle

Je reviens à ma vie de chien.

 

Jusqu'à demain,

Car dès demain...

 

Je me saoulerais pour venir te retrouver,

Je te le promets. Je nous le promets.

Mon Rêve, mon Amour. Ma Femme, ma Fée. Ma Chérie.

Tous les deux, nous partirons au pays sans soucis. ]

la suite un autre jour, hein!

promis...

Ecrit par Magnes, à 21:18 dans la rubrique " Ecrire avec des Nageoires ".
Lire l'article ! (suite de l'article + 0 commentaires)


Vendredi (30/04/04)
Sur l'eau : le reflet de la Lune...

--> ...Dans l'eau : ...

          Nous avions tout juste seize ans et nous étions une petite bande de garçons toujours fourrés ensemble. Nous aimions à nous promener dans la nuit de mon village de Lacroix-Falgarde. Nôtre plus grand plaisir était de nous réunir autour d’un feu de bois. Nous nous installions sur les berges de l’Ariège, qui coule un peu à l’extérieur du village.

Nous étions cinq ce soir là, Luc, Fabrice, Guillaume, Yves et moi. Nous étions allés chercher des bûches chez le châtelain du coin, puis nous amorcèrent nôtre foyer à l’aide de brindilles, cartons, restes de journaux. Arrosés d’un rien d’essence.

Une foi le chauffage central assuré, les discussions s’engagèrent : politique, grand banditisme ; argent et filles.

La Lune éclairait le paysage en se reflétant dans l’eau excitée de l’Ariège, c’était la fonte des neiges.

Les flammes crépitantes illuminaient nos visages et projetaient des ombres mouvantes sur les mûrs d’ombres, jusqu’au rivage opposé, par delà les tourbillons.

L’eau défilait, délirante et vibrante.

Le vent frais agitait les feuilles. Les fortes rafales sonnaient comme des cascades aériennes insensées.

De rares guimbardes traversaient à pleine vitesse le pont situé en amont. Chacun de ses passages produisait un bruit de tonnerre.

Yves et guillaume s’endormirent, bercés par l’Ariège.

Il était près de minuit quand la musicalité des eaux changea, leur symphonie naturelle indéfinie se mua en une mélodie étrange et silencieuse. Intrigués, nous laissâmes aller nos regards sur l’onde sombre. Nous n’en crûmes pas nos yeux, nôtre surprise éveilla les dormeurs et nous fûmes cinq à voir cela.

A quelques mètres de la berges trois personnes, étaient visibles, seules leur têtes étaient pour l’instant émergées mais ils se rapprochaient de la rive, et leur buste étaient maintenant visibles. Ils traversaient le courent, semblant marcher sur le fond du cours d’eau. Finalement, deux jeunes gens d’environ dix-sept ans et une femme plus âgée passèrent près de nous en nous saluant de la tête. La jeune fille, une beauté brune, souriait magnifiquement, le jeune homme, lui tenait la main. Il était châtain et de bonne constitution. Le couple paraissait très heureux. La femme se tenait en retrait, elle avait des cheveux mi-longs bouclés et marchait d’un pas nerveux comme pour rattraper ses prédécesseurs.

Nous restâmes abasourdis. Aurions-nous put avoir tous la même hallucination ? Non, ils étaient bien réels.

Aucun de nous ne les avait vue nager. D’accord la nuit était sombre, mais nager en pleine nuit ? En cette période de fonte des neiges ? Et puis, quelques soit l’heure et les courants, on ne fait pas trempette sans quitter ses vêtements.

Cet épisode obsédait mes pensées ainsi que, je le crois celle de mes compagnons cependant nous n’en parlâmes pas. Il semblait y avoir autour de cet bizarrerie une règle du silence entendue entre nous, discuter de cet événement décalé n’aurait fait qu’augmenter le mystère qui l’entourait et aucun de nous n’y tenait. La Lune poursuivait calmement son parcours parmi les étoiles, nous somnolions tranquillement sous son regard serein et bienveillant. Le feu déclinait.

Nous fûmes éveillés par le chant du coq mais un simple coup d’oeil à la position des astres nous apprit que l’on était encore à quelques heures de l’aube claire. La pleine Lune me souriait de façon inquiétante, je n’étais pas tranquille.

Des pas approchaient, se frayant un chemin dans les buissons, les étrangers reparurent. La fille pleurait maintenant, le garçon la soutenait en lui parlant tout bas. Nous les interpellâmes, cependant ils ne daignèrent pas nous accorder un regard. Ils remontaient l’Ariège.

La femme plus âgée, qui se tenait toujours en retrait de quelques pas, s’approcha de nôtre feu, elle frissonnait malgré la douceur de la nuit.

Nôtre association autour du foyer restait depuis d’interminables minutes silencieuse quand Yves demanda pour quelle raison la jeune fille pleurait, mais la femme parut étonnée que celle-ci eut versée des larmes. Guillaume lui demanda qui elle était, elle répondit en nous demandant si nous connaissions bien le village de Lacroix-Falgarde. Je répliquai que j’en étais natif. Elle appuya longuement son regard sur moi puis se présenta : «  Je suis Marie Laval ».

Des cris entremêlés percèrent alors la nuit, suivit d’un « plouf » tragique. Ces échos funestes semblaient venir du pont situé en amont. « Excusez-moi, mais je dois vous quitter » déclara madame Laval, avant de remonter à son tour la rivière.

Ces rencontres avaient semées le trouble dans nos esprits. Fabrice proposa de faire repartir le feu. Une bûche fût amenée, de l’essence versée adroitement.

Luc se tourna vers moi : « Tu la connais cette Marie Laval ?

-Non, répondis-je alors que le son d’un nouveau plongeon résonnait dans l’obscurité,  je ne l’ai pas connu mais j’en ai entendu parler » achevai-je.

Cette réponse brumeuse surprit mes compagnons qui ne me posèrent plus de questions. Ce manque de curiosité les préservait du désarroi dans lequel j’étais.

         Marie Laval était la mère de Christophe Laval. Ce dernier était amoureux fou de la belle Sandrine. Elle l’aimait en retour. Elle était orpheline. Madame Laval refusa le mariage à son fils. Le jeune couple sauta du pont, scellant leur amour dans la mort. On apprit que Sandrine était enceinte. Marie Laval, rongée de remord se suicida en sautant du même pont. On n’a jamais retrouvé leurs corps. Cette histoire datait de dix ans.

Ecrit par Magnes, à 21:51 dans la rubrique " Ecrire avec des Nageoires ".
Lire l'article ! (suite de l'article + 0 commentaires)